Nous maquillés pour le jour des morts au Mexique
Saisons

La fête des Morts à Oaxaca, Mexique

Une fois par année, nos morts reviennent nous rendre visite. Demain à midi, ce sont les enfants et après-demain, c’est le tour des adultes.

Ce week-end, ce sera Halloween, la fête des morts, la Toussaint… Plusieurs noms et différentes traditions liés au même événement. Déguisements, bonbons, fantôme et sorcières le soir, puis bougies et recueillement sur la tombe de nos proches partis… On se souvient d’eux, on leur amène des fleurs au cimetière. C’est comme ça que j’ai toujours connu le 1er novembre.

Mais l’année passée, j’ai pu vivre quelque chose de différent : le jour des Morts au Mexique. C’est une expérience que j’ai vraiment envie de vous raconter !

Au Mexique, Dia de los Muertos est une fête. Pas seulement une journée de recueillement et de souvenir, mais vraiment une fête ! Avec une ambiance de carnaval et des festivités qui durent une semaine ! Si vous avez vu le dessin animé Coco, vous comprenez de quoi je parle. L’ambiance festive et colorée représente parfaitement la réalité mexicaine, avec tous les détails comme les chiens errants, les enfants cireurs de chaussures, les mariachis dans les parcs, l’importance des traditions… c’est exactement ce qui se passe dans la vie réelle.

Avec mon mari et nos deux enfants, on a débarqué à Oaxaca, un peu au Sud de Mexico, une semaine avant cette fameuse date. Pleins de curiosité et d’envie de vivre cette occasion spéciale, on n’était pas préparés à ce qui nous attendait. Les Mexicains ont un respect incroyable pour leurs ancêtres et on a pu en être témoins.

En nous approchant du centre-ville d’Oaxaca, on croisait de plus en plus de personnes maquillées en calaveras (pour les hommes) et en Catrinas (pour les femmes), ces fameux squelettes mexicains. Il fallait absolument qu’on se fasse maquiller, nous aussi !

Nous maquillés pour le jour des morts au Mexique
Nous, maquillés pour la fête des Morts au Mexique

Arrivés au zócalo, la place centrale, une ambiance festive nous attendait. Les immeubles étaient magnifiquement décorés. Des princesses des ténèbres se promenaient dans le parc, des vendeurs ambulants proposaient leurs marchandises. Les nombreuses églises de la villes étaient remplies de fleurs et de bougies.

Eglise décorée pour la fête des Morts
Eglise décorée pour la fête des morts au Mexique
Eglises décorées pour la fête des Morts au Mexique

Devant la cathédrale, on observait un regroupement. On entendait de la musique. On s’approchait pour voir ce qui se passait. Un cortège préparait son départ. Un orchestre jouait devant, suivi par des enfants déguisés en squelettes, puis venaient les adultes.

Cortège de la fête des Morts à Oaxaca
Cortège à Oaxaca
Mexicaine déguisée en Catrina
Une Catrina

La foule augmentait d’heure en heure et le soir, on admirait le passage de plusieurs cortèges pendant de longues dizaines de minutes. Bruit, musique, danse… les gens faisaient la fête ! D’ailleurs, le slogan de la ville était « En Oaxaca, la muerte se vive », A Oaxaca, la mort se vit !

A Oaxaca, la mort se vit
A Oaxaca, la mort se vit!

La ville organise toutes sortes d’activités pendant cette semaine. Des histoires racontées aux enfants dans les bibliothèques, des expositions d’autels, des traditions ancestrales racontées aux adultes, des concerts, des spectacles, des cortèges, des visites de cimetières avec des légendes et histoires, des concours de déguisement et de « tapetes » qui sont des images faites de sables, de pierres et de fleurs par terre comme un tapis, des présentations de rituels ancestrales… la plupart de ces activités est gratuite. Même si les artisans et restaurateurs espèrent des gains financiers, on peut très bien profiter de la fête sans rien dépenser. Il y a des marchés colorés à plusieurs endroits en ville, on peut y observer le travail des artisans ou goûter des spécialités locales délicieuses.

Marché à la fête des morts à Oaxaca
Marché en ville
Entrée d'un magasin à Oaxaca, à la fête des Morts
Entrée d’un magasin
Entrée d'un restaurant à la fête des Morts au Mexique
Entrée d’un restaurant

Depuis plusieurs semaines, les supermarchés étaient déjà envahis de squelettes en sucre, de squelettes en chocolat, de squelettes de toutes sortes ! Au Mexique, la mort est douce. Les boulangeries proposent aussi du pains pour les morts.

Pains pour les morts
Des pains contenant une figurine, pour les morts

Dans les cimetières, les tombes étaient couvertes de fleurs. Plusieurs tombeaux avaient la porte ouverte, comme pour laisser sortir les esprits. D’ailleurs, devant plusieurs tombes se trouve un banc qui permet de s’assoir et passer un moment en compagnie de la personne aimée et perdue.

Cimetière à la fête des Morts, à Oaxaca
Des bancs, installés devant les tombes
Tombe à Oaxaca
Tombe décorée pour la fête des morts à Oaxaca
Une tombe décorée
Cimetière à Oaxaca, Mexique
L’arbre et les fleurs des morts oubliés, dans un cimetière à Oaxaca

Un jour, en nous promenant en ville, on entendait des chants qui venaient de derrière un mur en pierre. J’étais curieuse alors j’ai monté les quelques marches d’escaliers et je me suis retrouvée dans la cour d’une école primaire. Des groupes d’enfants chantaient devant l’autel de l’école, immense, dédié à son fondateur. Derrière, les élèves ont installé des tombes pour des personnalités connues du pays. Toute la journée, l’école proposait des activités aux élèves, leurs familles et les visiteurs comme nous.

Autel dans la cour d'une école primaire
Autel dans la cour d’une école primaire
Fausse tombe dans une école
Fausse tombe avec « tapete », réalisée par les élèves
Tombe de Frida Khalo, réalisée par des élèves
Tombe, réalisée par les élèves, en mémoire de Frida Khalo

Toute la ville baignait dans cette ambiance… musique, fête, fleurs, squelettes…

Pendant une semaine, on oublie les difficultés, on oublie la pauvreté, on oublie la vie qui n’est souvent pas facile au Mexique et on fait la fête !

Cortège de la fête des morts au Mexique
Cortège festif
Les festivités se poursuivent le soir
Les festivités se poursuivent le soir, sur la route

Ça, c’était la partie « officielle »… mais que se passe-t-il dans la vie privée ? Quelles sont les croyances réelles des Mexicains ?

Les gens installent des autels partout. Dans chaque maison, chaque magasin, restaurant, hôtel, partout. On y dépose des fleurs (des pétales de roses d’Inde ou cempasúchil en espagnol qui est la fleur des morts, et aussi d’autres fleurs), des offrandes pour les esprits (de la nourriture et des boissons qu’ils aimaient de leur vivant), des pains pour les morts, des bougies et des photos.

Autel familial pour la fête des morts au Mexique
Autel familial
Autel pour la fête des Morts à Oaxaca, Mexique
Autel en ville
Grand autel de la ville d'Oaxaca
Grand autel de la ville d’Oaxaca
Roses d'Inde, les fleurs de la mort au Mexique
Cempasúchil, les fleurs de la mort

Avec mon mari, on se demandait si les Mexicains y croyaient vraiment à cette histoire de retour sur Terre ou s’ils font tout ça juste par habitude, parce que c’est la tradition. On leur a posé la question et la réponse nous a troublés : « Ils viennent. Demain, c’est les « Angelitos », les angelots qui sont les enfants, puis après-demain les adultes. Ils sont tous là, sur des photos posées sur l’autel. Je leur cuisine leur plat favoris. Poulet au mole (sauce mexicain épicée, à base de chocolat noir) pour mon père, des enchiladas pour ma soeur. J’y mets des sucreries et quelques jouets pour mon petit-fils qui n’avait que deux ans. »

Dans leur voix et leur regard, il n’y a aucun doute : leurs proches leur rendent visite. C’est une certitude émouvante et réconfortante.

La fin des festivités

A la fin de la semaine, on raccompagne les morts dans les cimetières. Une fois de plus, ce sont des cortèges très bruyants, avec musique et festivités qui marchent depuis le centre-ville jusqu’aux cimetières.

On raccompagne les morts au cimetière
Le cortège est arrivé au cimetière

Là, on prend un dernier verre avec les êtres chers. Certaines familles installent carrément des tables à côté de la tombe. Ils se réunissent l’après-midi avec toute la grande famille, préparent le dîner, sortent des bouteilles et prennent un dernier repas avec l’esprit de leurs proches, là, au cimetière.

Famille prenant le dernier repas au cimetière
Une famille, prenant le dernier repas avant de dire au revoir à leurs morts

Un vieux monsieur est assis sur une tombe, fait santé avec une bouteille qu’il boit lui-même, il dépose l’autre devant la photo de la personne enterrée.

Vieux monsieur sur une tombe
Un vieux Monsieur boit avec un être cher perdu

Un groupe d’amis ouvre des bières sur une autre tombe, en n’oubliant pas leur copain décédé. Des parents apportent des jouets sur la tombe de leur enfant. Ils ne leur disent pas adieu. Ils disent au revoir, à l’année prochaine. Et nous, on est là, au milieu de ces gens, et on essaie de retenir nos larmes. Ce respect, ce partage nous touchent profondément. On est ému et bouleversé. Pour les Mexicains, c’est une croyance, une tradition millénaire et pour eux, c’est naturel d’avoir ce contact avec leurs morts. Chaque année, ils célèbrent la vie de leurs ancêtres et partagent ces quelques jours avec eux. Venant d’un autre continent avec une tradition différente, on a soudain envie d’être Mexicains. On a tant envie de croire avec eux que les gens que nous avons aimés et perdus sont encore là, quelque part, et que chaque année, ils peuvent revenir nous rendre visite. On a tant envie de partager non pas la douleur de la perte, mais la joie des retrouvailles qu’on observe ici.

En Europe, la tradition chrétienne nous donne l’espoir de revoir nos proches, un jour au Paradis… d’être réunis après que nous-mêmes on soit passés de l’autre côté. Les Mexicains fêtent cela chaque année. Ils se souviennent des morts en célébrant la vie. Finalement, c’est le cours normal de la vie… on meurt tous un jours. Mais tant qu’on reste dans les souvenirs et dans le coeurs de ceux qui nous ont aimés, on ne meurt pas vraiment.

Après cette expérience mexicaine, je ne verrai plus jamais la fête des morts comme avant. Je n’oublierai jamais ce que j’ai vu à Oaxaca. Je n’oublierai pas que la mort se vit et que la vie doit être célébrée chaque jour, en profitant de chaque instant pour aimer, partager, être heureux.

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