Bonheur

L’univers sait ce qu’il fait…

Je vais vous raconter une histoire… une histoire vraie qui vous montrera que parfois, les événements décevants peuvent devenir les plus beaux cadeaux de la vie. Je vais vous raconter comment j’ai compris que pendant ces deux dernières années, rien n’est arrivé par hasard et que malgré ma colère et frustration par moment, l’univers savait très bien ce qu’il faisait. Aujourd’hui, je suis infiniment reconnaissante mais j’ai mis deux ans à comprendre le sens de tout ce qui m’arrivait. Vous allez bientôt comprendre…

En juillet 2019, avec mon mari et nos deux enfants, nous avons commencé une nouvelle vie. Nous en rêvions depuis longtemps, enfin nous nous sommes lancés dans un voyage autour du monde qui devait durer au moins deux ans, peut-être même trois. Nous nous réjouissions de découvrir de nouveaux pays sur différents continents, d’apprendre de nouvelles langues et cultures, de faire des rencontres et surtout de vivre tout cela ensemble, en famille ! Tout a bien commencé et nos six premiers mois au Mexique étaient magiques. Puis nous sommes montés aux Etats-Unis où nous avons acheté un camping car : nous étions tellement contents de poursuivre nos découvertes, installés dans notre maison roulante ! Il était prévu que nous le gardions au moins un an pour faire le tour des USA et du Canada. Mais à peine plus d’un mois après l’achat du véhicule, les choses ont changé. On était en mars 2020 et le Covid a débarqué dans notre vie. Je vous épargne les détails mais vous devinez qu’avec les restrictions et les frontières fermées, notre grand voyage a pris brusquement fin et en avril 2020, nous étions de retour à la maison.

Après les premières semaines, la situation devenait pesante et de plus en plus difficile à vivre. J’étais tellement frustrée et en colère !! J’avais un grand sentiment d’injustice, j’avais l’impression que je n’étais pas là où je devais être. Au lieu de notre tour du monde prévu, nous devions nous contenter de 9 mois et seulement 2 pays… (je sais, je sais, c’est déjà mieux que rien, mais par rapport à nos projets, c’était vraiment frustrant!)

Je passais mon temps à ruminer et l’été est arrivé. En Europe, les frontières ont rouvert et on en a profité pour aller rendre visite à ma famille en Hongrie. On y a passé un bon mois, en profitant de passer du temps avec mes parents et mes frère et soeurs.

Avec mon mari, on s’est dit que puisqu’on ne pouvait toujours pas repartir et qu’on avait le temps, autant profiter pour faire des travaux à la maison… le toit devait être changé, on le savait et repoussait depuis longtemps, on a donc décidé de le faire avant la fin de l’été. A peine quelques jours avant notre retour en Suisse, mon mari a demandé, à l’improviste, à mon papa s’il voulait venir nous aider et passer un peu de temps chez nous. Après un peu d’hésitation, il a finalement accepté. J’avoue que ça me faisait un peu peur. Ma relation avec mon papa était très compliquée pendant longtemps… pendant mon adolescence, j’avais peur de lui et parfois même je le détestait. Ensuite, j’ai passé pas mal de temps à le provoquer, on avait souvent des conflits. Avec les années, ça c’était calmé et on s’entendait plutôt bien, mais en restant plutôt à distance. J’avais du mal à rester seul avec lui. J’évitais ces moments par peur de ne pas savoir quoi lui dire, par peur d’un silence embarrassant… on était si différents et pas très proches… Je me demandais comment j’allais pouvoir passer deux semaines avec lui, sans ma maman qui jouait souvent le rôle de pont entre nous.

Maintenant, je peux vous dire que c’était deux semaines fantastiques qui m’ont permis de me rapprocher de mon papa, de le connaître sous un nouveau jour et de vivre de moments merveilleux avec lui. Pour la première fois de ma vie, j’ai passé des soirées entières, jusqu’à tard dans la nuit, à discuter avec lui. Seulement lui et moi. Pour la première fois dans ma vie, on a eu des conversations vraiment profondes et personnelles, comme jamais auparavant. Pendant ces deux semaines, il était joyeux et détendu, non pas stressé et grincheux comme souvent. Je n’oublierai jamais son sourire quand il a pu essayer la moto de mon mari, ni son admiration devant la vitrine de l’atelier d’un fabricant de guitare ou lors de nos promenades dans les montagnes suisses qu’il aimait tant. Je n’oublierai jamais ma surprise de voir à quel point il tenait à se lever le matin pour accompagner ma fille à l’école. Je trouvais ça tellement chou et émouvant ! Son enthousiasme à m’apprendre sa façon de préparer une omelette ou apprendre aux enfants à faire une soupe. Jouer à la guitare avec eux. Souffler ses bougies d’anniversaire en les serrant dans ses bras. Regarder la télé avec ses petits-enfants dans les bras. Jouer avec notre chien.

J’ai découvert une nouvelle facette de mon papa, éveillant en moi un respect et un amour plus fort que je n’avais jamais ressentis pour lui auparavant. Je me sentais tout à coup si proche de lui, je commençais enfin à le comprendre. C’est avec le coeur brisé que je me suis séparée de lui le jour où il a pris l’avion pour rentrer en Hongrie. Il me manquait beaucoup, mais on est bien sûr resté en contact. On s’écrivait plus souvent, on se parlait plus souvent. Notre vision du monde se rapprochait de plus en plus. On était sur la même longueur d’onde. Pour moi, ce changement était énorme et j’étais très heureuse !

Avec l’arrivée de l’automne, la dépression me regagnait de plus en plus. On avait pensé pouvoir repartir rapidement pour continuer notre voyage, mais cette pandémie ne voulait pas finir, notre camping car nous attendait aux Etats-Unis mais les frontières restaient désespérément fermées. On a beaucoup réfléchi, parlé, hésité de retourner au Mexique. On essayait d’analyser les avantages et inconvénients, les possibilités et les difficultés… mais plus le temps passait, plus je désespérais et déprimais. En octobre, on était pas loin de prendre la décision de repartir en novembre. Pour le Mexique, c’était faisable. Mais je me suis mise à hésiter… plus la fin de l’année approchait, plus j’avais le sentiment qu’on devait attendre les fêtes. Ma famille se réjouissait de nous revoir, je ne pouvais pas les décevoir en repartant juste avant Noël ? On a donc décidé d’attendre janvier. On cherchait déjà des maisons à louer au bord de la mer ! Malheureusement, on n’a pas pu aller en Hongrie pour les fêtes, la frontière fermée pour cause de Covid nous en a empêchés. Pour me consoler, ma petite soeur est venue nous rendre visite en Suisse, au moins on a pu les voir, elle et son fiancé. Mais quand ils sont repartis, la frustration a repris de plus belle. J’avais voulu attendre les fêtes pour revoir ma famille, c’est uniquement pour cela qu’on était pas encore reparti à l’autre bout du monde… les fêtes étaient passées, sans que je puisse voir mes parents, nos économies diminuaient et je voyais nos chances de repartir s’éloigner de plus en plus. De nouveau, j’étais en colère ! Je regrattais de ne pas être partis en automne, comme on avait hésité à le faire. En plus, c’était à cause de moi. J’avais l’impression d’avoir loupé notre chance pour rien. Plus le temps passait, plus il était clair que nous étions bloqués à la maison. La pandémie durait encore et encore, on n’aurait jamais pensé que ça allait durer si longtemps. Ma maman avait tellement espéré qu’on puisse aller les voir pour Pâques, mais les frontières hongroises n’ouvraient toujours pas. Six mois ont passé, on a enfin pu les rejoindre en juillet et passer un mois avec eux. Ce mois m’a permis de comprendre que mon papa, qui a toujours eu un caractère explosif, qui a toujours été provocateur et même parfois agressif, ne désirait plus que la paix désormais. En profitant d’une occasion imprévue, on a pu passer avec lui quelques jours en Roumanie : visiter les lieux de son enfance, rencontrer son meilleur ami de jeunesse, aller voir la maison de mes grands-parents qui l’a vu naître et grandir. Ces quelques jours sont devenus un trésor incroyable ! On était tellement heureux d’avoir pu vivre cela à ses côtés !!

Finalement, tout se passait bien. Vu les événements, nos projets ont gentiment changé… au lieu d’un grand voyage, nous commencions de rêver d’une vie tranquille et autonome dans une ferme. La situation dans le monde nous a fait comprendre beaucoup de choses, on a revu nos valeurs et nos priorités et on a commencé de chercher des fermes en vente, dans différents pays. L’objectif était d’y aménager avec mes parents ! Mon papa était prêt à nous suivre n’importe où. La tranquillité d’une ferme, la nature, les animaux le faisaient rêver depuis longtemps et moi je rêvais de plus en plus de pouvoir lui offrir cette vie pour sa retraite. Tant pis pour le voyage, pour le camping car resté aux USA. Ce nouveau projet me redonnait de l’énergie et de l’optimisme. On passait des jours à chercher des annonces de fermes et on avait déjà prévu d’en visiter plusieurs en Hongrie pendant les vacances de Noël. On essayait de ne plus penser au Covid. Mon inquiétude du début pour mes parents s’était envolé depuis longtemps, alors qu’en presque deux ans ils sont restés en bonne santé, sans l’attraper.

Puis, fin novembre 2021, ils sont tombés malades. C’est venu tout à coup, sans qu’on s’y attende. On a décidé du jour au lendemain d’aller les rejoindre pour prendre soin d’eux. On leur préparait de bonnes soupes aux légumes, je les bourrais de vitamines, de thé, de tout ce que je pouvais pour les aider à guérir au mieux. J’étais sûre que tout allait bien se passer. J’ai dit plusieurs fois que mon seul but était qu’on soit tous ensemble à Noël. Je n’avais aucun doute qu’ils allaient guérir, qu’il leur fallait juste un peu de temps. Mon papa était si heureux qu’on soit venu ! D’ailleurs, pendant quelques jours, on a vu une amélioration. Puis une semaine après notre arrivée, il s’est tout à coup senti mal. Il a demandé une ambulance. J’ai déposé un bisous sur sa tête juste avec qu’ils l’amènent, à 16 heures… les enfants regardaient l’ambulance partir depuis leur fenêtre… quelques heures plus tard, on a appris qu’il était mort. Je suis incapable de décrire la douleur que j’avais ressenti. D’ailleurs, le lendemain de son décès, je suis tombée malade. Je n’arrivais pas à accepter cette situation, je ne comprenais pas comment cela avait pu arriver. Ça n’avait aucun sens ! Ça ne devait pas se passer comme ça.

Ce jour-là, mon papa a fait une embolie pulmonaire. Liée au covid ou rien à avoir, on ne le saura jamais. Le covid a sûrement aggravé son état, il avait une pneumonie. Mais il avait aussi d’autres facteurs de risque qui le menaçaient depuis des années…

Il s’est montré très fort jusqu’à la dernière minute. En repensant après coup à son attitude, des choses qu’il a dites, j’ai compris qu’il était prêt à partir. Il ne voulait pas le précipiter bien sûr, mais il savait qu’un jour son heure allait arriver et il attendait ce jour en acceptant la volonté du destin. Il était désormais en paix. Il n’avait pas peur de la mort : il croyait que la vie continue après. Mais nous, on était pas du tout prêt à le laisser partir. Pas comme ça… pas à seulement 65 ans…

5 mois ont passé depuis ce jour qui reste gravé en tant que pire souvenir de toute ma vie. Je fais ce que je peux pour continuer à vivre et ne pas ressentir cette douleur étouffante dans le coeur en permanence.

Mais au bout de ces cinq mois, j’ai enfin compris qu’il n’y a pas de hasard. Quelqu’un m’a dit qu’il était désolé pour nous d’avoir dû interrompre notre voyage. J’ai répondu que maintenant, je suis infiniment reconnaissante d’avoir été obligés de rentrer. Encore plus de ne pas avoir pu repartir. Malgré toute la colère et la frustration que j’ai pu ressentir à cause de mes projets gâchés, j’ai enfin compris que tout cela était un cadeau de l’univers. Un cadeau pour pouvoir vivre nos meilleurs moments avec mon papa, pour garder les meilleurs souvenirs. Je ne pourrai jamais en être sûre, mais je crois, tout au fond de mon coeur, que son heure est arrivé ce lundi 6 décembre 2021. Covid ou pas, je crois qu’il serait parti de toute façon. Alors je dis un immense merci à l’univers d’avoir utilisé le covid pour nous ramener à la maison, de nous avoir empêchés de repartir, de nous avoir permis de passer tout ce temps avec lui et surtout de nous avoir amenés auprès de lui pour passer sa dernière semaine ensemble. Aujourd’hui, je sais que rien n’arrive par hasard et que ça devait se passer comme ça. Aujourd’hui, je suis infiniment triste d’avoir perdu mon papa et en même temps, je me sens infiniment heureuse et chanceuse d’avoir pu partager ces moments avec lui. Je suis fière et reconnaissante d’avoir été sa fille et il restera toujours dans mon coeur.

Voilà comment une situation frustrante et désagréable peut prendre tout son sens, même si on ne le comprend pas tout de suite. Ayez confiance : l’univers sait ce qu’il fait. Profitez du présent, profitez de chaque instant et soyez heureux.

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